Coordination d’axe : Daiana Dula, Ines Garmon
Les recherches interdisciplinaires engagées partent du constat que la robotique connectée tend à occuper ouvertement l’espace public et relationnel quotidien, au point de se présenter comme un pivot des communications ordinaires. A la faveur des développements des technologies smartifiées[1], eux-mêmes portés par un capitalisme numérique attentionnel et affectif dont la force idéologique est désormais largement documentée, les robots compagnons œuvrent à la fabrication d’une mimesis transhumanisante et à la métamorphose radicale des représentations sociales et sociétales. Ainsi, par exemple, du robot humanoïde Sophia, gynoïde conçue pour imiter le comportement des êtres humains et notamment ses mimiques, grimaces, ou encore ceux de la série Westoworld (HBO), ou du dispositif d’Her (Spike Jonze).
Terme issu de la didactique, la gestique désigne l’ensemble des gestes en tant que moyens d’expression. Adossée aux robots compagnons, la gestique permet de cheminer vers la compréhension des processus d’anthropomorphisation qui les fondent, et par là des matérialités, supports, langues, fonctionnalités etc., qui justifient les incorporations et les narrativités mises en exergue par les discours promotionnels.
Cette perspective amène à observer, d’une part, les efforts des designs contemporains pour « joindre le geste à la geste ». D’autre part, elle rend possible la critique de l’émergence d’un imaginaire réifié et redistribué, particulièrement par les robots compagnons et les robots sexuels connectés. Nous serons ainsi notamment attentifs aux récits que ces designs et ces dispositifs produisent.
De même qu’on admet désormais une « intelligence » des dispositifs, ces narrativités gestuelles interrogent la possibilité d’une « physiologie » du geste numérique, une « morphologie » des contenus, cependant que se poursuivraient les « médiamorphoses » de la langue.
[1] Néologisme chargé de désigner les dispositifs dits smarts. A la différence de « digitalisé(s) » ou « informatisés », le qualificatif rend lisible la portée idéologique du mot, dont les emplois sans traduction indiquent la doctrine (cf. Dula, 2019).
Domaines de thématisation (non exhaustifs)
- Enjeux socio-sémiotiques de la reconnaissance et de la ressemblance
- Fictivité/fictionnalité du character (personnage) humanoïde
- Gestes contacts et gestes d’interactivité – « micro-moments » qui engagent la mise en contact
- Incorporation et organicité
Axes analytiques de la gestique des robots humanoïdes
1) Un effort affectif, cognitif et axiologique
Le robot impose un cadre contraignant pour la communication. Cette communication peut être qualifiée en termes de simulacres (une communication simulacre d’interaction où l’utilisateur joue un jeu pré-écrit en amont, auquel il ne peut se soustraire).
La représentation de la communication par les robots humanoïdes repose sur certaines conceptions que ces outils naturalisent. En particulier, la communication avec les robots passe en grande partie par une “micro-communication” qui implique des micro-mouvements gestuels et faciaux engageant des jeux de reconnaissance et de ressemblance.
2) Un renouvellement des paradigmes de la communication
La fictionnalité gestique se définit par de la digression, voire le digest. Le discours d’escorte s’attache à pulvériser la frontière entre le corps artificialisé inscrit dans le quotidien et le corps artificialisé en objet.
La conception anthropomorphique et organique des robots et de l’IA demande à être interrogée à l’aune de la réification de l’imaginaire dont les prémices ont été enclenchées par la popularisation des plateformes et logiciels dédiés.
Mots-clés :
Robot humanoïde, réification, narrativité, micro-communication, geste physique/somatique, tracé digital, corps, robotisation, IA, incorporation, organicité, geste médiamorphosé
Contacts :
Daiana Dula : daiana.dula@univ-lehavre.fr
Ines Garmon : inesgarmon@hotmail.com
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