Axe 4. La place des écrans dans l’enfance et l’adolescence: de la geste imaginaire au geste réel

Coordination d’axe : Fabien Bitu, Carine Roucan

Cet axe de recherche étudie la place des écrans dans les familles, dans l’imaginaire des enfants et des adolescents, et dans la relation parents-enfants. Les gestes nouveaux induits par la place des écrans à la maison s’accompagnent d’une nouvelle façon de considérer la famille, en créant du lien ou, au contraire, en empêchant la communication. Les écrans font partie de l’environnement familial et écrivent une histoire différente : de même que la photographie a développé l’idée de mémoire familiale, les écrans modifient la geste dans les foyers. Les parents et les enfants se racontent et se découvrent les uns les autres en ligne, se créent des avatars dont les postures, les symboles et les gestes reflètent et contredisent leur personne socialement admise par la famille. La place des écrans a notamment fait évoluer un aspect de la relation parents-enfants dans les foyers : celui de la lecture. L’histoire familiale quotidienne s’accompagne d’histoires racontées, dont la transmission est redéfinie par les évolutions numériques.

Domaines de thématisation :

  • l’enfant, l’adolescent et les environnements littéraires numériques
  • la chaîne du livre de jeunesse numérique
  • l’imaginaire numérique chez l’enfant
  • la pensée numérique de l’enfant
  • la place des écrans dans l’environnement systémique de l’enfant

Axes analytiques :

1) Les environnements littéraires numériques chez l’enfant et l’adolescent

Le numérique dans la chaîne du livre de jeunesse : Éditeurs, parents et enfants

Dans une ère où le numérique redéfinit les pratiques de lecture, les maisons d’édition jeunesse investissent de plus en plus dans des formats numériques (livres interactifs, applications éducatives, plateformes en ligne). Ces outils transforment non seulement l’acte de lire, mais aussi la relation entre les éditeurs, les parents et les enfants (Bélisle, 2011). En analysant cette nouvelle chaîne du livre, nous cherchons à comprendre comment les maisons d’édition conçoivent ces supports numériques et comment ces derniers sont perçus par les parents, souvent prescripteurs du livre, et les enfants, récepteurs finaux. Cette approche interroge également l’effet de ces innovations sur les habitudes de lecture des jeunes et sur la médiation parentale qui entoure ces nouvelles pratiques. Une attention particulière est accordée aux stratégies des éditeurs pour promouvoir la lecture auprès des jeunes via le numérique et à l’efficacité de ces dispositifs en termes d’incitation à la lecture.

Le numérique comme incitation à la lecture chez l’enfant et l’adolescent

Le rapport entre numérique et lecture est souvent perçu de manière antagoniste. Pourtant, certaines études indiquent que les technologies numériques peuvent, sous certaines conditions, stimuler l’intérêt pour la lecture chez les jeunes (Ciampa, 2012 ; van der Vlies, 2020). Cette section explore comment les outils numériques, notamment les applications de lecture interactive et les livres augmentés, redéfinissent les pratiques de lecture des enfants et des adolescents, en intégrant des éléments ludiques et multimédias. À travers une approche comparative et empirique, nous étudierons l’impact de ces dispositifs sur la motivation à lire, la compréhension et l’engagement littéraire, tout en cherchant à comprendre quels types d’environnements numériques sont les plus propices à l’incitation à la lecture.

2) L’imaginaire numérique de l’enfance 

Représentations sociales et culturelles des écrans dans l’enfance

Cette thématique se penche sur la manière dont les écrans et leurs usages sont représentés dans les discours sociaux, médiatiques et littéraires. Elle explore également la façon dont les récits et les images véhiculés par les écrans influencent la construction des mythes et imaginaires collectifs autour de l’enfance, du numérique et de la modernité (Amadieu & Tricot, 2013). Cette approche intègre une dimension historique, en s’intéressant à l’évolution des discours sur les technologies face à la jeunesse.

La pensée numérique de l’enfant : perception et conception par l’adulte

Cette thématique explore comment les adultes (parents, enseignants, éducateurs) perçoivent la pensée numérique des enfants et des adolescents, et comment ils interprètent les compétences numériques développées par les jeunes générations. Certaines recherches ont montré que les adultes projettent souvent des craintes ou des idéalisations sur les compétences numériques des enfants, ce qui peut influencer la manière dont ils les accompagnent dans leurs pratiques numériques (Clark, 2012 ; Livingstone, 2016). Cette partie vise à analyser les croyances et représentations des adultes vis-à-vis des usages numériques des enfants, afin de comprendre comment ces représentations façonnent les dynamiques d’encadrement et de régulation des écrans dans le cadre familial et éducatif.

 3) Dynamiques du geste numérique des environnements de l’enfance

Pratiques et usages des écrans par les enfants et adultes dans les foyers

Cette thématique s’intéresse aux types d’écrans utilisés (télévision, tablettes, smartphones, ordinateurs, etc.), aux modalités d’usage (solitaires, partagés, interactifs ou passifs), ainsi qu’aux enjeux éducatifs et familiaux que ces usages soulèvent. Les études montrent que les écrans peuvent être à la fois source de conflits et d’opportunités de rapprochement au sein des familles (Hiniker, 2016 ; Blum-Ross & Livingstone, 2018; Livingstone et al., 2018). Cet axe de recherche interroge comment le rapport à l’écran modifie la dynamique parent-enfant, les tensions ou les complémentarités entre activités numériques et non numériques, et vise à comprendre comment les parents régulent ou encouragent ces pratiques. Nous étudierons également comment les écrans influencent les pratiques parentales et les différentes stratégies mises en place pour équilibrer les activités numériques et non numériques.

Rôle et place des écrans dans les structures d’accueil (écoles, crèches, bibliothèques)

L’intégration des écrans dans les structures d’accueil de l’enfance, telles que les écoles, les crèches, ou les bibliothèques, peut amener à redéfinir la conception de l’accompagnement, et le rôle des professionnels de l’enfance. Des questions cruciales émergent autour de l’impact de ces outils sur l’apprentissage, la créativité et la socialisation des enfants. Cet axe vise à analyser les différentes modalités d’intégration des écrans dans les différents espaces-temps de l’enfance, en mettant en lumière les pratiques innovantes, mais aussi les limitations et les résistances rencontrées. Il vise ainsi à explorer la diversité des approches pédagogiques liées aux écrans, en tenant compte des spécificités des différentes structures d’accueil. Cette partie explorera également l’évolution de la place et de la conception des professionnels de l’enfance à l’ère du numérique.

Contacts : 

Fabien Bitu : fabien.bitu@univ-rouen.fr

Carine Roucan : carine.roucan@univ-lehavre.fr

Références : 

Amadieu F., Tricot A., Apprendre avec le numérique, éditions Retx, “Mythes et réalités”, 2020.

Bélisle C. (dir.), Lire dans un monde numérique, Lyon, Presses de l’Enssib, 2011, 295 p., ISBN : 9782910227852.

Campa K., “Reading in the Digital Age: Using Electronic Books as a Teaching Tool for Beginning Readers / La lecture à l’ère numérique: l’utilisation de livres électroniques comme outil d’enseignement pour les lecteurs débutants”, CJLT Volume 38, Number 2, Jul 20, Canadian Network for Innovation in Education, 2012, https://www.learntechlib.org/p/42890/

Hiniker, Alexis & Schoenebeck, Sarita & Kientz, Julie. (2016). Not at the Dinner Table: Parents- and Children-s Perspectives on Family Technology Rules. 1374-1387. 10.1145/2818048.2819940.

Livingstone, Sonia & Blum-Ross, Alicia. (2020). Parenting for a Digital Future: How Hopes and Fears about Technology Shape Children’s LivesHow Hopes and Fears about Technology Shape Children’s Lives. 10.1093/oso/9780190874698.001.0001.

Livingstone, Sonia and Mascheroni, Giovanna and Staksrud, Elisabeth (2018) European research on children’s internet use: assessing the past and anticipating the future. New Media and Society, 20 (3). pp. 1103-1122.  DOI: 10.1177/1461444816685930

Livingstone, S., & Sefton-Green, J. (2016). The Class: Living and Learning in the Digital Age (Vol. 1). NYU Press. http://www.jstor.org/stable/j.ctt18040ft

Van der Vlies, R. (2020), « Digital strategies in education across OECD countries : Exploring education policies on digital technologies », Documents de travail de l’OCDE sur l’éducation, n° 226, Éditions OCDE, Paris, https://doi.org/10.1787/33dd4c26-en.

Axe 3. Geste amateur(e) dans les productions audiovisuelles

Coordination d’axe : Soufyane Chafik, Christophe Pique, Marine Siguier 

Cet axe de recherche vise à interroger les enjeux sémiologiques, politiques, esthétiques et écologiques du “geste amateur” dans les productions audio-visuelles. Ces recherches se focalisent sur l’analyse d’un corpus de contenus audiovisuels produits par des non-professionnels (publications sur les réseaux socionumériques, mèmes, films documentaires, etc.).

La revendication d’une esthétique du « bricolage », du « mal-fait » participe d’une tendance fondatrice sur Internet (Douglas, 2014). Historiquement, le bricolage participe d’une contre-culture contestataire au fondement même des imaginaires d’Internet (Flichy, 2012). À l’inverse, le fonctionnement des réseaux socionumériques, tout en se présentant comme des « cadres vides » (Doueihi, 2011) accueillant les contenus amateurs, repose sur des logiques de standardisation très fortes. La popularisation de certains formats, les contraintes inhérentes au modèle économique des plateformes, poussent les utilisateurs à l’adoption de codes et de normes communes, qui entraine une uniformisation des contenus. La posture des pro-am (Leadbeater et Miller 2004), ces amateurs qui adoptent des pratiques semi-professionnelles, escamote l’axiologie de la singularité au profit de pratiques communautaires qui reposent sur la production de contenus très standardisés.

Nous proposons d’explorer la tension qui travaille le paradigme de l’amateur, entre :

1)    La revendication d’une esthétique du bricolé, du laid (ou du « moche » ?), qui seraient une manière de revendiquer une forme d’authenticité. 

2)    À l’inverse, une volonté amateure de se surconformer aux standards formels et esthétiques de l’environnement médiatique qui accueille ses contenus.

Il s’agira donc d’interroger la geste derrière les gestes de l’amateurisme : quels discours, quels récits, quelles valeurs sous-tendent cette double posture de l’amateur, entre résistance et conformité ?  

Domaines de thématisation : 

Enjeux sémio-esthétiques du “laid”

Puissance communicationnelle du stéréotype

Cultures visuelles et résistances

Axes analytiques : 

1) Résistances et stéréotypes 

L’esthétique du bricolage se situe du côté de la revendication politique, de la résistance, de la volonté de se singulariser (ex : revendication artisanale de la réalisation de film dans l’œuvre de Cavalier ou Morder). À l’inverse, l’esthétique standardisée relève d’une volonté de massification, de popularisation des contenus, qui va de pair avec une adaptation aux contraintes économiques des dispositifs (ex : produire du « beau » sur Instagram pour ne pas rebuter les annonceurs). L’amateurisme comme résistance ou comme reproduction communautaire du même, du similaire ?

2) Médiation neutre ou enchantement du réel 

Les productions amateures s’inscrivent dans un rapport ambivalent au rôle de la médiation. Certains contenus amateurs de notre corpus visent à reproduire le réel tel quel, à se faire miroir de l’ordinaire, sans rien enjoliver. Cet objectif, nécessairement illusoire (puisqu’on ne peut pas ne pas représenter), nous invite à interroger les limites de la posture authentique (la mise en scène de l’absence de mise en scène). D’autres, au contraire, assument une volonté d’enchantement du quotidien dans une optique de standardisation proposée par les industries numériques normatives qui régulent les gestes des utilisateurs (Souchier, 2019) (ex : rajouter des filtres, des accessoires, aux photos qu’on publie sur Instagram).

Ces tensions axiologiques peuvent être formalisées dans un carré sémiotique, synthétisant les différentes facettes que peut prendre le paradigme de l’amateurisme :

L’un des objectifs de notre recherche sera d’interroger les valeurs, les esthétiques et les récits associés à chaque valeur de ce carré, à travers des études de cas issues de corpus audiovisuels variés, à l’instar des exemples ci-dessous :

Mots clés :

Amateur, audiovisuel, bricolage, médiation, politique du regard, culture visuelle, résistance, conformisme

Contacts :

Soufyane Chafik : soufyane.chafik@univ-tours.fr

Christophe Pique : christophe.pique@univ-rouen.fr

Marine Siguier : marine.siguier@univ-lehavre.fr

Références :

CERVULLE Maxime & SAEMMER Alexandra. Regard et communication. L’Harmattan, Paris, 2020.

CHATEAU, Dominique et JOST, François. Nouveau cinéma, nouvelle sémiologie. Paris: Les Éditions, vol. 10, 1979.

CITTON, Yves. « Les Lumières de l’archéologie des media ». Dix-huitième siècle, 2014, no 1, p. 31-52.

CITTON, Yves, DOUDET, Estelle, et al. (ed.). Écologies de l’attention et archéologie des media. UGA Éditions, 2019.

D’ARMENIO, Enzo. « L’audiovisuel face au numérique: les gestes sémiotiques autour des prothèses, des dispositifs et des archives ». MEI. Media et Information, 2019, vol. 47.

DUCELLIER, Marie. « La création audiovisuelle avec les gestes et regards ordinaires des adolescents ». Recherche sociale, 2022, no 2, p. 62-93.

DOUEIHI, Milad, « Un humanisme numérique », Communication & langages, vol. 167, n°1, 2011, p. 3-15.

DOUGLAS, Nick. « It’s supposed to look like shit: The Internet ugly aesthetic ». Journal of visual culture, 2014, vol. 13, no 3, p. 314-339.

FLICHY, Patrice, Le Sacre de l’amateur : sociologie des passions ordinaires à l’ère numérique, Paris, Seuil, 2010.

FLICHY, Patrice. L’imaginaire d’Internet. La Découverte, 2012.

LEADBEATER, Charles et MILLER, Paul, The Pro-Am Revolution: How Enthusiasts are Changing our Economy and Society, Londres, Demos, 2004.

ODIN, Roger, Les espaces de communication : introduction à la sémio-pragmatique, Presses Universitaires de Grenoble, 2011.

PAPILLON, Ariane. « Les circulations des vidéos amateur entre Internet et Cinéma: productions, appropriations, diffusions d’archives» Proteus-Cahiers des théories de l’art, 2021, no 17.

RAIMOND, Sophie et TAILLIBERT, Christel. Réemplois contemporains du film amateur : Acteurs, intentionnalités. L’Harmattan, 2023.

SOUCHIER, Emmanuel, Le numérique comme écriture: théories et méthodes d’analyse, Armand Colin, Malakoff, 2019.

Axe 2. La reconnaissance faciale : cognition, émotion, significations

Coordination d’axe : Peppe Cavallari, Joël Colloc, Béatrice Galinon-Mélénec

Le cadre théorique de notre approche est celui de la théorie externaliste et de la cognition incarnée (Varela, Maturana, etc.) et celle, plus récente, de Martin-Juchat (2005), Lenay (2006), dans laquelle la perception, les émotions et l’empathie se produisent dans l’espace relationnel, corporel et gestuel. Les notions de “signe-trace” et de “corps-trace” (Galinon-Mélénec, 2011, 2019, 2020) actualisent les questions phénoménologiques qui en découlent, tout en se positionnant par rapport à des courants historiques comme, par exemple, celui de Kant qui distingue la « chose en soi » et le phénomène qui se manifeste dans le perçu, ou celui de Merleau-Ponty qui situe la perception comme étant déjà une simulation de l’action. Dans le contexte du groupe de recherches InterGestes, ces notions aboutissent à étudier une phénoménologie des gestes qui souligne que la reconnaissance et la compréhension des gestes d’autrui est un facteur crucial de la dimension humaine des gestes. Quels signes-traces permettent à l’humain de détecter qu’un geste provient d’un autre humain ou d’une machine ? Que se passe-t-il quand un geste humain est reconnu par une machine ? 

L’anthropologie (Gebauer, Wulf, 2004) nous apprend comment observer cette matérialité, en expliquant que pour comprendre l’humain, il faut d’abord regarder ses prolongements. Aujourd’hui, nos prolongements sont les écrans entre lesquels et dans lesquels évolue la technogenèse du visage (Zilio, 2018).

Nous visons une classification des différents exemples de « visagerie numérique » (Cavallari, 2018, 2021) pour comprendre comment celle-ci s’intègre à « l’histoire du visage ». Le visage sera considéré non pas comme objet mais comme relation : nous allons étudier comment nous “faisons visage” dans les échanges numériques, en les mettant en tension avec la reconnaissance des contenus émotionnels.

Nous voulons déterminer une classification des différentes « visagéries numériques » (Cavallari, 2018, 2021) pour comprendre comment celles-ci s’intègrent à une plus large “histoire du visage”.

Dans cette perspective, l’émotion n’est pas considérée uniquement comme l’externalisation de ce qui aurait son origine à l’intérieur de l’espace psychique; elle est également prise en tant que production, qu’œuvre collective et publique.

Domaines de thématisation : 

-pratiques numériques (profilage, identité numérique, réseaux sociaux, communication à distance)

-santé, relation médecin-patient, soins, thérapie.

Axes analytiques de la technologie de la reconnaissance des émotions :  

– Le rôle du visage dans les relations humaines à l’époque du numérique.

– L’apport des recherches en sémiotique dans la reconnaissance des émotions.

– Les effets sociétaux de l’usage de la reconnaissance faciale, de sa circulation dans l’espace social et de son usage par les institutions.

– La construction phénoménologique de l’e.santé : les effets sur la relation médecin-patient. Questionnements phénoménologiques de la généralisation de l’e. santé.

Mots clés : 

Communication, société numérique, visage, interactions humain-machine, écrans, gestes, corps, perception, cognition incarnée, émotion, affect.

Contacts : 

Peppe Cavallari : peppe.cavallari@gmail.com

Joël Colloc : joel.colloc@univ-lehavre.fr 

Béatrice Galinon-Mélénec : beatrice.galinon-melenec@univ-lehavre.fr

Références : 

Bachimont, B., (2022), « La complexité herméneutique à l’épreuve du calcul », Interfaces numériques, 10(3), https://doi.org/10.

Battesti Vincent, Candeau Joël, (Dir., (2023), Apprendre les sens, Apprendre par les sens : anthropologie des perceptions sensorielles. Éditions Petra.

Beyaert-Geslin, A., (2022), L’algorithme et l’organon sémiotique. Actes du congrès de l’Association Française de Sémiotique (2022)https://doi.org/10.25965/as.

Berthoz, A., (1997), Le sens du mouvement, Paris, Jacob, 1997

Cardon, D., (2015), A quoi rêvent les algorithmes. Nos vies à l’heure des big data, Paris, Seuil.

Cavallari, Peppe, (2017), ”Les gestes dans l’environnement numérique : la ponctuation des affects, RFSIC.

Cavallari, Peppe, (2018), Performativité de l’être-en-ligne. Pour une phénoménologie de la présence numérique, Thèse, https://theses.hal.science/tel-02458177/document

Cavallari, Peppe (2021), «La visagérie numérique : un nouveau paradigme de l’altérité», dans G. Serrano (dir), Numérique Secundum Affectum. Regards interdisciplinaires sur technique et affects, Paris, Hermann, p.233-260

Coello Yann (dir.), (2024), Corps, cerveau et processus mentaux, Dunod.

Colloc, J., (2016) « Perspectives and Ethics of the Autonomous Artificial Thinking Systems », The 28th International Conference on Systems Research, Informatics and Cybernetics, Symposium on Spotlight Research in Modelling & Simulation of Physical & Biological Systems Depending on Space, Time, Retardation, Anticipation, Aug 2016, Baden-Baden, Germany.

Cosnier Jacques, Vaysse Josseline, (1997), “Sémiotique des gestes communicatifs”, in Guy Barrier, (dir.), Geste, cognition et communication, Nouveaux Actes Sémiotiques, n° 52-53-54, Limoges, Pulim, pp. 7-28.

Couderc, Romain, (2023), « Les traces de l’expression : du geste à la sédimentation du sens dans “Au travers de la phénoménologie : l’expression et les traces du sens chez Merleau-Ponty”, Philosophie, vol. 157, no. 2, pp. 42-66.

Depraz Nathalie, (2004), « Le tournant pratique de la phénoménologie », Revue philosophique, 2004, pp. 149-165.

Didi-Huberman Georges, (2024), La Fabrique des émotions disjointes (Faits d’affect, 2), mars 2024, Minuit. http://www.leseditionsdeminuit.fr/livre-La_Fabrique_des_émotions_disjointes-3434-1-1-0-1.html

Flüsser, V., (1983), Pour une philosophie de la photographie, Paris, Circe édition, 1983.

Hardy, Jean-Sébastien, (2018), La chose et le geste. Phénoménologie du mouvement chez Husserl, Epimethée, PUF.

Fontanille Jacques,(1998, 2000), Sémiotiques du corps : l’enveloppe et le mouvement Du corps communicant au corps signifiant, de l’adjuvant à l’actant, C-sémiotique, https://www.unilim.fr/pages_perso/jacques.fontanille/textes-pdf/Csemiotique_corps1998_2000.pdf

Galinon-Mélénec, Béatrice (dir.), (2011), L’Homme-trace. Des traces du corps au corps-trace, Paris, CNRS éditions. https://books.openedition.org/editionscnrs/29821

Galinon-Mélénec Béatrice, (2019), “Pour une ichnologie générale à l’heure du numérique “, in Revue Communication & traces numériques, 2019/1, Liénard F. et Zlitni S. (dir.), Presses universitaires Rouen-Le Havre.

Galinon-Mélénec, Béatrice, (2020), L’Odyssée de la trace, tome 1, London, Iste éditions, Willey.

Garçon, Anne-Françoise, (2016), « Des modes d’existence du geste technique », e-Phaïstos [En ligne], IV-2 | 2015, mis en ligne le 29 novembre 2016, consulté le 24 janvier 2024. URL : http://journals.openedition.org/ephaistos/797 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ephaistos.797

Gebauer, Gunter, Wulf, Christoph, (2004), Jeux, rituels, gestes. Les fondements mimétiques de l’action sociale, (trad.fr), Anthropos.

Martin-Juchat Fabienne, (2005), Penser le corps affectif comme média, texte d’HDR. https://www.academia.edu/93333306/Penser_le_corps_affectif_comme_média?email_work_card=view-paper

Lenay, Charles, (2006), Énaction, Externalisme et Suppléance Perceptive, Intellectica, 2006/1, 43, pp. 27-52 

Merleau Ponty, Maurice, (1945), Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard.

Mille Martine et Petit Joëlle (2014), « La vie du geste technique. Approche pluridisciplinaire », e-Phaïstos [En ligne], III-1 | 2014. https://doi.org/10.4000/ephaistos.573

Zilio Marion, (2018), Faceworld. Le visage au XXIème siècle, Paris, PUF.

 

Axe 1. Gestique des robots humanoïdes : anthropomorphisation, incorporation et récits des robots humanoïdes 

Coordination d’axe : Daiana Dula, Ines Garmon 

Les recherches interdisciplinaires engagées partent du constat que la robotique connectée tend à occuper ouvertement l’espace public et relationnel quotidien, au point de se présenter comme un pivot des communications ordinaires. A la faveur des développements des technologies smartifiées[1], eux-mêmes portés par un capitalisme numérique attentionnel et affectif dont la force idéologique est désormais largement documentée, les robots compagnons œuvrent à la fabrication d’une mimesis transhumanisante et à la métamorphose radicale des représentations sociales et sociétales. Ainsi, par exemple, du robot humanoïde Sophia, gynoïde conçue pour imiter le comportement des êtres humains et notamment ses mimiques, grimaces, ou encore ceux de la série Westoworld (HBO), ou du dispositif d’Her (Spike Jonze).

Terme issu de la didactique, la gestique désigne l’ensemble des gestes en tant que moyens d’expression. Adossée aux robots compagnons, la gestique permet de cheminer vers la compréhension des processus d’anthropomorphisation qui les fondent, et par là des matérialités, supports, langues, fonctionnalités etc., qui justifient les incorporations et les narrativités mises en exergue par les discours promotionnels.

Cette perspective amène à observer, d’une part, les efforts des designs contemporains pour « joindre le geste à la geste ». D’autre part, elle rend possible la critique de l’émergence d’un imaginaire réifié et redistribué, particulièrement par les robots compagnons et les robots sexuels connectés. Nous serons ainsi notamment attentifs aux récits que ces designs et ces dispositifs produisent.

De même qu’on admet désormais une « intelligence » des dispositifs, ces narrativités gestuelles interrogent la possibilité d’une « physiologie » du geste numérique, une « morphologie » des contenus, cependant que se poursuivraient les « médiamorphoses » de la langue.

[1] Néologisme chargé de désigner les dispositifs dits smarts. A la différence de « digitalisé(s) » ou « informatisés », le qualificatif rend lisible la portée idéologique du mot, dont les emplois sans traduction indiquent la doctrine (cf. Dula, 2019).

Domaines de thématisation (non exhaustifs)

  • Enjeux socio-sémiotiques de la reconnaissance et de la ressemblance
  • Fictivité/fictionnalité du character (personnage) humanoïde
  • Gestes contacts et gestes d’interactivité – « micro-moments » qui engagent la mise en contact
  • Incorporation et organicité

Axes analytiques de la gestique des robots humanoïdes

1) Un effort affectif, cognitif et axiologique 

Le robot impose un cadre contraignant pour la communication. Cette communication peut être qualifiée en termes de simulacres (une communication simulacre d’interaction où l’utilisateur joue un jeu pré-écrit en amont, auquel il ne peut se soustraire).

La représentation de la communication par les robots humanoïdes repose sur certaines conceptions que ces outils naturalisent. En particulier, la communication avec les robots passe en grande partie par une “micro-communication” qui implique des micro-mouvements gestuels et faciaux engageant des jeux de reconnaissance et de ressemblance.

2) Un renouvellement des paradigmes de la communication

La fictionnalité gestique se définit par de la digression, voire le digest. Le discours d’escorte s’attache à pulvériser la frontière entre le corps artificialisé inscrit dans le quotidien et le corps artificialisé en objet.

La conception anthropomorphique et organique des robots et de l’IA demande à être interrogée à l’aune de la réification de l’imaginaire dont les prémices ont été enclenchées par la popularisation des plateformes et logiciels dédiés.

Mots-clés : 

Robot humanoïde, réification, narrativité, micro-communication, geste physique/somatique, tracé digital, corps, robotisation, IA, incorporation, organicité, geste médiamorphosé

Contacts : 

Daiana Dula : daiana.dula@univ-lehavre.fr

Ines Garmon : inesgarmon@hotmail.com

Références :

BESNIER Jean-Michel, Demain les posthumains, Hachette, 2009

BONENFANT, M., LAFRANCE ST-MARTIN L. I. et CRÉMIER L., « Affected Data: Understanding Knowledge Production in Algorithmic Events”, Global Media Journal – Canadian Edition, 2020, 11 (2).

CACCAMO E., BONENFANT M., « Rhétorique des discours transhumanistes : arguments et fondements discursifs », Communication et langage, 210(4), 2021, pp. 5-31.

CASILLI, Antonio A., En attendant les robots. Enquête sur le travail du clic, Seuil, 2019

CITTON Yves, Gestes d’humanités : anthropologie sauvage de nos expériences esthétiques, Armand Colin. Le temps des idées, 2012.

CITTON Yves, BRAITO Angela (éds). Technologies de l’enchantement. UGA Éditions, 2014.

COHEN, Daniel, Homo numericus. La “civilisation” qui vient, Albin Michel, 2022

COOREN François. « Ventriloquie, performativité et communication. Ou comment fait-on parler les choses », Réseaux, 163, 33-54, 2010. https://doi.org/10.3917/res.163.0033

DEVILLERS, LAURENCE. Les Robots émotionnels. Santé, surveillance, sexualité… : et l’éthique dans tout ça ? », Éditions de l’Observatoire, 2020

DULA Daiana, « Le numérique incorporé : de l’analogie à l’axiologie », La communication électronique : enjeux, stratégies, opportunités, Lambert-Lucas, 2015

DULA Daiana,, « Le robot est-il un mème ? Trace, projection et mimétisme des objets compagnons », in L’Homme-trace. La trace, du sensible au social (Boulekhbache, Galinon-Mélénec, Leleu Merviel dir.), CNRS Editions, 2021

GARMON Inès, « ‘Les petits gestes’ dans leur anthropologie communicationnelle. Étudier la digipulation des applications », Préparée sous la direction d’Étienne Candel (CERLIS), soutenue le 27/03/2023.

GARMON Inès, CHEVET, Clotilde, « Le geste et la parole à l’ère du numérique : de quoi le “swipe” et la commande vocale sont-ils l’énonciation ? Sur les gestualités énonciatives dans les interfaces naturelles », Médiation et Information, n° 47, 2019, p. 131-144.

GUILLO Dominique, La culture, le gène et le virus. La mémétique en question, Hermann Editeurs, 2009

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